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Sanction du défaut de notification de l'extension du Casino Port Plaisance (décision n° 2021-DN-02 du 5 août 2021))

Casino bio

L'ACNC inflige une amende de 14 MF à la société Supermaché Port Plaisance (SPP) pour avoir manqué de notifier l'extension de son magasin "Casino Port Plaisance" avant l'ouverture d'un nouveau local de 79,76 m² dans lequel elle a placé ses rayons "bio" depuis le 24 juillet 2020, portant la surface de l'ensemble du supermarché de 800 à 879,76 m².

Procédure :

Pour mémoire, la société SPP avait a du notifier cette opération d’extension le 23 novembre 2020 après une demande d’information puis une mise en demeure de la part de la rapporteure générale. L’Autorité, qui a autorisé l’opération a posteriori dans une décision n° 2021-DEC-02 du 28 janvier 2021, s’est par ailleurs auto-saisie de l’infraction consistant en un défaut de notification de l’opération par décision n° 2020-SO-03 du 4 novembre 2020, qui est sanctionnable sur le fondement du deuxième alinéa du I de l’article Lp. 432-5 du code de commerce. Cette disposition prévoit que l’Autorité « peut infliger à l’exploitant auquel incombait la notification une sanction pécuniaire qui ne peut dépasser 200 000 F. CFP par mètre carré de surface commerciale concernée ». En l'espèce, le montant maximum de l'amende s'élevait donc  à 15 934 000 F.CFP.

Les moyens soulevés en défense

Pour sa défense, la société SPP soutient qu’elle n'avait pas notifié l'opération car il s'agissait, de son point de vue, de l'ouverture d'une "boutique éphémère". En effet, elle rappelle qu'elle avait contracté un bail commercial le 9 août 2019 au sein de la galerie Port Plaisance sans savoir précisément la manière dont elle utiliserait ses nouvelles surfaces commerciales.

Au cours de la séance devant l'Autorité, elle a précisé qu’elle envisageait au départ une installation éphémère de certains de ses rayons en raison de travaux à réaliser dans le magasin principal puis qu’elle a ensuite envisagé de déplacer ses rayons de boissons alcoolisées dans ce nouveau local commercial étant donné les obligations imposées par la délibération n° 13-2020/APC du 7 mai 2020 modifiant le code des débits de boissons dans la province Sud. Finalement, les travaux initialement envisagés n’ont pu avoir lieu en raison de la crise sanitaire en 2019 et la société SPP a décidé de déplacer ses rayons « bio » en raison de l’obligation de « garnissage » imposée par le bailleur, dans l’attente d’y placer ses boissons alcoolisées lorsque la règlementation de la Province Sud serait adoptée et en vigueur. Elle soutient donc qu’en raison du caractère éphémère de la vente de produits bio dans cette surface commerciale, elle a cru ne pas être tenue de notifier l’opération à l’Autorité. Elle reconnaît avoir commis une erreur d’appréciation et souligne sa diligence pour notifier cette opération dès la demande du service d’instruction de l’Autorité.   

La réponse de l'Autorité 

En réponse, l’Autorité considère que les règles régissant la contrôlabilité des opérations de commerce de détail ne prévoient pas d’exception tenant au caractère éphémère d’une ouverture ou d’une extension d’un commerce de détail. Ces règles ne soulevaient pas de difficulté d’interprétation en l’espèce dès lors que la société SPP avait, dès le départ, l’intention de déplacer certains de ses rayons du magasin principal vers cette nouvelle surface commerciale. Elle souligne en outre que le bail commercial signé par la société SPP destine cette nouvelle surface de vente « exclusivement au commerce de produits alimentaires et cosmétiques bio et naturels » et a été conclu pour une durée de neuf ans. Elle ajoute que, compte tenu des termes du bail concernant la destination commerciale de cette nouvelle surface de vente, la nature des produits alimentaires ou cosmétiques vendus dans ce local à titre temporaire ou permanent par la société SPP est sans incidence sur le fait qu’il s’agit d’une extension de son magasin principal. Il en résulte que l’argument reposant sur le « caractère éphémère » de l’opération d’extension de la surface de vente de la société SPP au sein de la galerie Port Plaisance ne peut qu’être écarté.

Au surplus, l’Autorité rappelle qu’à supposer que la société SPP ait eu un doute sur le caractère notifiable de l’extension du magasin « Casino Port Plaisance », elle aurait pu interroger le service d’instruction de l’Autorité en amont de l’ouverture de cette nouvelle surface commerciale ou se tourner vers sa maison-mère, la société GBH, qui dispose de ressources juridiques et d’une expertise majeure en matière de notification des opérations contrôlables auprès des autorités de concurrence. En outre, si elle estimait que le « garnissage » de ce local était urgent compte tenu de ses obligations prévues dans le bail, elle aurait pu notifier l’opération et demander une dérogation, à titre exceptionnel, sur le fondement du VI de l’article Lp. 432-2 du code de commerce, pour exploiter commercialement ce local sans attendre la décision définitive de l’Autorité.

En l’espèce, l’Autorité en conclut que le défaut de notification de l’extension du supermarché « Casino Port Plaisance » d’une surface de vente de 79,67 m² est établi. 

Détermination de la sanction

La société SPP, qui reconnaît son erreur d’appréciation, précise dans ses observations écrites qu’elle n’a aucunement eu l’intention de contourner la loi et sollicite l’absence de sanction de la part de l’Autorité. Au cours de la séance, la société SPP a invité l’Autorité à tenir compte, dans l’hypothèse d’une sanction, de sa bonne foi et de sa situation financière dès lors que le résultat net de la société SPP est inférieur au montant maximal de la sanction encouru, puisqu’il s’établit à 12 millions de francs CFP en 2019.

L’Autorité constate que si la société SPP a réalisé un résultat net comptable de 12 millions de francs en 2019, son chiffre d’affaires s’établit à 1,2 milliard de francs CFP et le montant des dividendes distribués à ses actionnaires s’élève à 50 millions de francs CFP la même année. Il en résulte que sa situation financière lui permet de faire face, le cas échéant, au montant maximal de la sanction encourue, et ce d’autant plus que le groupe GBH a, pour sa part, réalisé un chiffre d’affaires de 39 milliards de francs CFP.

L’Autorité considère que le défaut de notification d’une opération de commerce de détail est, par nature, une infraction grave à l’ordre public économique. En effet, ce défaut de notification prive l’Autorité de la possibilité d’examiner les effets potentiellement anticoncurrentiels du projet d’extension préalablement à sa réalisation et envoie un mauvais signal aux autres opérateurs sur le marché.

En l’espèce, cette infraction apparaît d’autant plus grave qu’elle émane de la société SPP, qui appartient au groupe GBH, leader sur le marché de la distribution au détail de produits à dominante alimentaire, lequel dispose d’une longue expérience du contrôle des opérations de commerce de détail en Nouvelle-Calédonie et qui n’a pas, pour autant, dénoncé spontanément ce manquement même a posteriori.  

A titre de circonstance atténuante, l’Autorité retient néanmoins que la société SPP n’a pas cherché délibérément à contourner le contrôle des opérations de commerce de détail au regard des risques concurrentiels anticipés de l’opération. Elle retient également que le manquement est d’une durée relativement courte en raison de la coopération de la société SPP après avoir été mis en demeure de régulariser l’opération par le service d’instruction.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, l'Autorité inflige à la société SPP une amende de 14 MF.

Ce communiqué a une valeur purement informative. Seuls font foi les motifs de la décision.