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Pourquoi améliorer les délais de paiement ?
L'amélioration et la réduction des délais de paiement inter-entreprises répond à trois enjeux fondamentaux :
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Un enjeu économique : les délais de paiement anormalement longs pèsent sur la trésorerie des entreprises vendeuses. Ils créent un besoin de financement qui peut les pénaliser jusqu'à la conduire à la cessation des paiement. Les PME et les TPE sont les principales victimes du non-respect des délais de paiement car un grand acheteur a la capacité d’imposer ses conditions de paiement à ses petits fournisseurs. Dans la mesure où le tissu économique de la Nouvelle-Calédonie est composé de nombreuses PME et TPE, la lutte contre le non-respect des délais de paiement est une priorité pour l'ACNC.
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Un enjeu concurrentiel : la capacité d’une entreprise acheteuse à obtenir des délais de paiement plus longs a un effet direct sur sa compétitivité par rapport à ses concurrents en lui procurant une trésorerie gratuite pour développer son activité. A l’inverse, le respect des délais de paiement légaux par un acheteur peut lui conférer un avantage concurrentiel si ses concurrents ont mauvaise réputation en la matière.
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Un enjeu de négociation commerciale entre le fournisseur et le distributeur qui peuvent de fait être à l’origine de certains comportements abusifs.
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Quelles sont les règles applicables en Nouvelle-Calédonie en matière de délais de paiement ?
L'article Lp. 443-2 du code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie précise que "le délai de règlement des sommes dues est fixé au trentième jour suivant la date de réception des marchandises ou d'exécution des prestations".
Il existe une exception pour les produits de consommation courante obtenus, fabriqués ou transformés localement :
- Pour les produits frais, le délai de règlement est de 10 jours après la quinzaine calendaire pour les entreprises de -10 salariés ou après la fin du mois de livraison pour les autres.
- Pour les autres catégories de produits, le délai de règlement est de 14 jours après la fin du mois de livraison.
Les accords interprofessionnels approuvés par arrêté du GNC peuvent également déroger aux délais de paiement légaux. Toutefois ce dispositif n'a pas été mis en oeuvre en Nouvelle-Calédonie à ce jour.
Le non-respect des délais de paiement est passible d'une amende administrative de 1 million F.CFP pour une personne physique et 5 millions F. CFP pour une personne morale (article Lp. 443-3 du code de commerce).
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Comment calcule-t-on les délais de paiement en Nouvelle-Calédonie ?
En Nouvelle-Calédonie, le délai de droit commun est de 30 jours suivant la réception des marchandises ou l’exécution des prestations. Le nombre de jours effectifs compris entre le point de départ du délai de paiement et son expiration est donc systématiquement identique. Les opérateurs peuvent néanmoins convenir de délais de paiement inférieurs à 30 jours.
Il existe également des délais spéciaux pour les produits locaux de consommation courante. L’arrêté n° 2008-91/GNC, qui régit les délais spéciaux, distingue :
- Les produits frais produits par les entreprises locales comptant moins de 10 salariés ;
- Les produits frais produits par les entreprises locales comptant plus de 10 salariés ;
- Les autres produits locaux de consommation courante.
Les délais spéciaux applicables sont les suivants :
- 10 jours après la quinzaine calendaires pour les produits frais produits par les entreprises locales comptant moins de 10 salariés ;
- 10 jours après la fin du mois de livraison pour les produits frais produits par les entreprises locales comptant plus de 10 salariés ;
- 14 jours après la fin du mois de livraison pour les autres produits locaux de consommation courante.
Le nombre de jours effectifs compris entre le point de départ du délai de paiement et son expiration est donc susceptible de varier selon que la prestation de service ou la livraison des marchandises est intervenue en début ou en fin de mois.
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Peut-on fixer des délais de paiement différents selon les clients dans les documents contractuels ?
Le délai de 30 jours est un délai maximum. Ce délai maximum est d’ordre public : les parties ne peuvent pas prévoir un délai supérieur, même contractuellement. La mention d’un délai de paiement supérieur au délai légal dans des documents contractuels est passible d’une amende administrative d’un montant maximum de 5 millions de F. CFP pour chacun des opérateurs en cause.
En revanche, les parties peuvent prévoir un délai inférieur à 30 jours par contrat ou dans les conditions générales de vente ou d’achat. Si l’acheteur n’accepte pas le délai prévu par les conditions générales de vente, il peut négocier un contrat spécifique. A défaut d’accord entre les parties, le délai est le délai légal de 30 jours.
Les délais de paiement peuvent résulter de la négociation commerciale et peuvent donc varier selon les clients, à condition qu’ils respectent dans tous les cas le maximum légal et qu’ils soient justifiés par des contreparties réelles et des critères objectifs. Des délais de paiement discriminatoires sont interdits.
Il est également possible de prévoir des distinctions concernant les délais de paiement dans les conditions générales de vente « selon les catégories d’acheteurs » (article Lp. 441-6 du code de commerce).
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L'émission de la facture peut-elle être le point de départ du délai de paiement ?
L’article Lp. 443-2 du code de commerce prévoit explicitement que le délai de paiement de 30 jours court à compter de la date d’exécution de la prestation ou de la livraison de la marchandise.
Dans la mesure où l’article Lp. 441-3 du code de commerce indique que le prestataire est tenu de délivrer la facture dès la réalisation de la prestation ou la livraison de la marchandise, le point de départ du délai de paiement doit coïncider avec l’émission de la facture.
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Quel est le point de départ du délai de paiement pour des prestations de longue durée ou des livraisons multiples ?
S’agissant des prestations de longue durée, la loi calédonienne ne prévoit pas expressément cette hypothèse.
Pour ce type de situations, le code de commerce de l’Etat se réfère à des « factures périodiques » et prévoit un délai de paiement à compter de la date d’émission de la facture périodique.
L’ACNC conseille donc aux entreprises calédoniennes de prévoir dans leurs contrats ou dans leurs conditions générales de vente, l’émission de factures périodiques, qui seront considérées comme marquant les différentes étapes d’exécution de la prestation continue. Dès lors, le point de départ du délai de paiement pourra être décompté à la date d’émission de chacune des factures périodiques, en veillant à maintenir un délai de paiement de 30 jours maximum à compter de cette date.
S’agissant des livraisons multiples au même acheteur dans le même mois, deux options sont tolérées pour permettre aux opérateurs de simplifier leur facturation tout en respectant les dispositions légales en vigueur :
- Émettre une seule facture périodique lorsque plusieurs livraisons de biens ou de services interviennent durant le même mois au profit d’un même acheteur. En effet, selon l’article Lp. 514 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, la facturation peut être établie « périodiquement pour plusieurs livraisons de biens ou prestations de services réalisées au profit d’un même acquéreur ou preneur et pour lesquelles l’exigibilité intervient au cours d’un même mois civil ». Dans ce cas, il est conseillé de prévoir l'émission d'une facture périodique dans les conditions générales de vente ou dans un contrat. De plus, la facture périodique doit être émise au cours du mois auquel ont lieu les livraisons. Le délai de paiement de 30 jours commence à courir à la date de la première livraison visée par la facture périodique. Une facture périodique doit respecter les règles de facturation prévues à l’article Lp. 441-3 du code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie.
Exemple : Plusieurs livraisons ont été réalisées le 1er janvier 2022 et le 14 janvier 2022. La facture périodique est émise le 15 janvier 2022 et prévoit un règlement unique pour l'ensemble des livraisons ayant eu lieu entre le 1er et le 14 janvier avant le 31 janvier 2022.
- Établir un relevé de factures afin de regrouper une série de factures, établies conformément à l’article Lp. 441-3 du code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie. Ces relevés de factures ont pour but de récapituler sur une période donnée les sommes à payer pour alléger les procédures de règlement. Cela permet en effet de ne procéder qu’à une seule opération de règlement, étant précisé que le délai de paiement légal de 30 jours court à compter de la date d’émission de la première facture figurant sur le relevé, celle-ci devant être établie le jour de la livraison de la marchandise.
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Quel délai s’applique si les documents contractuels (conditions générales de vente ou d’achat) ne le mentionnent pas ?
En l’absence de mention d’un délai dans les documents contractuels, ou en l’absence de documents contractuels, le délai légal s’applique.
Ce délai est fixé à 30 jours après la date de réception des marchandises ou d’exécution de la prestation (article Lp. 443-2 du code de commerce).
Les produits locaux de consommation courante bénéficient de délais réglementaires propres (arrêté n° 2008-91/GNC du 3 janvier 2008).
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Quel est le délai de paiement applicable dans les échanges commerciaux internationaux ?
Même si la jurisprudence n’est pas encore clairement établie en matière de pratiques restrictives de concurrence au niveau national, il convient, de manière générale, de retenir le lieu d’exécution de la prestation pour déterminer le droit applicable. De plus, les règles relatives aux délais de paiement sont considérées comme des « lois de police » c’est-à-dire qu’elles s’appliquent même si les cocontractants choisissent de se soumettre à un autre droit.
Dans l’hypothèse où la prestation est effectuée en Nouvelle-Calédonie (les produits sont destinés au marché calédonien), il faut donc respecter les règles du code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie.
A l’inverse, si un fournisseur calédonien livre un client en métropole, ce sont a priori les règles du code de commerce de l’Etat qui seront suivies (délai de 30 jours sauf dispositions contractuelles contraires).
Pour des relations commerciales avec des entreprises étrangères, le délai de paiement applicable résulte d’une appréciation casuistique, car il est possible que des conventions internationales s’appliquent et puissent avoir un effet sur les règles en matière de délai de paiement.
Pour plus d'informations, il est possible de consulter l'avis de l'ACNC n°2022-A-03 relatif à l’interprétation des articles Lp. 441-8 et Lp. 441-9 du code de commerce.
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Que faire lorsqu’un acheteur ne respecte pas les délais de paiement ?
Lorsqu’un acheteur ne respecte pas les délais de paiement, plusieurs solutions sont possibles :
En premier lieu, il est possible de demander immédiatement le paiement des pénalités de retard. L’acheteur doit s’acquitter de ces pénalités de sa propre initiative, car elles sont dues sans qu’un rappel soit nécessaire.
Les modalités d’application des pénalités de retard sont impérativement prévues dans les conditions générales de vente (CGV) lorsqu’elles existent. L’omission d’une telle mention dans les CGV est passible d’une amende administrative allant jusqu’à 5 millions de F. CFP (art. Lp. 441-6 VII du code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie).
En tout état de cause, le taux de pénalité appliqué ne peut être inférieur à trois fois le taux de l'intérêt légal en cours (art. Lp. 441-6 IV du code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie) sous peine d’être considéré comme un avantage concurrentiel indu et sanctionné par l’ACNC.
Si l’acheteur respecte généralement les délais de paiement mais qu’il lui arrive de les dépasser, en raison d’une insuffisance de trésorerie, par exemple, le plus simple est de faire application de ces pénalités.
En deuxième lieu, il est également possible de saisir l’ACNC. Le non-respect des délais de paiement est considéré comme un manquement à la loi et peut, de ce fait, être sanctionné. Il ne se confond pas, toutefois, avec les difficultés de recouvrement qui n'entrent pas dans le champ de compétence de l'ACNC.
En cas de non-respect des délais de paiement, l’amende administrative susceptible d'être infligée par l'ACNC peut aller jusqu’5 millions de F.CFP.
En troisième lieu, il est possible d’engager une procédure devant le juge judiciaire pour obtenir la mise en cause de la responsabilité civile de l’acheteur et une éventuelle indemnisation (article Lp. 442-6 du code de commerce).
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Quel montant fixer pour les pénalités de retard ?
Les pénalités de retard sont exigibles en cas de retard de paiement. Elles doivent être prévues dans les conditions générales de vente, comme l'exige l'article Lp. 441-6 du code de commerce.
Le montant des pénalités de retard doit être au moins équivalent à celui qui résulterait de l'application d'un taux égal à trois fois le taux de l'intérêt légal en cours. Le taux de l'intérêt légal est fixé par un arrêté ministériel prévu par l'article L. 313-2 du code monétaire et financier applicable en Nouvelle-Calédonie (voir l'article L. 743-3 du même code).
Pour le 1er semestre de l'année 2020, le taux de l'intérêt légal est fixé par l'arrêté du 23 décembre 2019 qui distingue :
- Le taux applicable lorsque le créancier est une personne physique n'agissant pas pour des besoins professionnels : 3,15 %
- Le taux applicable pour les autres créanciers : 0,87 %
Le montant minimum des intérêts de retard est donc défini de la façon suivante :
(montant impayé x taux d’intérêt légal) x (nbre de jours de retard / 365) = Intérêts de retard
Pour un professionnel dont la créance est de 2 millions F. CFP et qui subit un retard de 40 jours, le calcul est le suivant :
2 millions F.CFP x (0,87 x 3 = 2,61 %) x (40/365 = 0,10) = 5720 F.CFP
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Quel est le délai de prescription en matière de non-respect des délais de paiement ?
En matière de délais de paiement, le délai de prescription est de trois ans à compter du jour où le manquement a été commis.
Le délai de prescription est toutefois interrompu par tout acte tendant à la recherche, la constatation ou la sanction de ce manquement.
A titre d’exemple, si une plainte est déposée à l’ACNC pour non-respect des délais de paiement le 1er janvier 2023, l’ACNC ne pourra constater et sanctionner les manquements que depuis le 1er janvier 2020, même si la pratique dure depuis 2018.
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Comment faire pour saisir l’ACNC en cas de non-respect des délais de paiement ?
Pour saisir l’ACNC en cas de non-respect des délais de paiement, il convient de réunir le maximum d’éléments pour démontrer l’existence de la pratique.
La plainte auprès de l’ACNC doit mentionner :
- L’identité du plaignant et celle de l’entreprise mise en cause ;
- La référence aux dispositions du code de commerce qui fondent la plainte (article Lp. 443-2 pour les délais de paiement) ;
- Les faits de l’espèce ;
- Le contexte (la description de la relation commerciale) ;
- Les éléments qui permettent de considérer que la loi n’a pas été respectée (balance clients, factures de vente et d’achat de l’entreprise, liasse fiscale, grand livre client lettré de la période considérée, échantillon des factures et preuves de paiement correspondantes, les CGV et CGA…).
La plainte doit être adressée à l’ACNC, soit par lettre recommandée, soit par dépôt au siège de l’ACNC contre délivrance d’un récépissé, soit sous format électronique à l’adresse contact@autorite-concurrence.nc
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- Peut-on fixer des délais de paiement différents selon les clients dans les documents contractuels ?
- L'émission de la facture peut-elle être le point de départ du délai de paiement ?
- Quel est le point de départ du délai de paiement pour des prestations de longue durée ou des livraisons multiples ?
- Quel délai s’applique si les documents contractuels (conditions générales de vente ou d’achat) ne le mentionnent pas ?
- Quel est le délai de paiement applicable dans les échanges commerciaux internationaux ?
- Que faire lorsqu’un acheteur ne respecte pas les délais de paiement ?
- Quel montant fixer pour les pénalités de retard ?
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