En décembre 2023, l’Autorité s’est saisie d’office pour examiner des pratiques susceptibles d’enfreindre l’interdiction des accords exclusifs d’importation, introduite par la loi du pays n° 2014-7 du 14 février 2014. L’instruction a révélé que les sociétés Intelia et Ericsson avaient maintenu une exclusivité d’importation entre mars 2014, date de l’entrée en vigueur de la loi, et septembre 2024. Cette exclusivité était initialement prévue dans un contrat de distribution exclusive conclu en 2009 et, après 2020, maintenue par un contrat de distribution sélective et des refus de vente répétés.
Cette exclusivité a conféré à Intelia une position monopolistique pour la distribution des solutions Ericsson en Nouvelle-Calédonie, au détriment des clients finaux, tels que l’OPT, et des distributeurs concurrents.
Pour fixer le montant des sanctions, l’Autorité s’est fondée sur la valeur des ventes des produits et services en relation avec l’infraction, en tenant compte de la gravité des pratiques, du dommage causé à l’économie et de la durée de l’infraction, qui s’étend sur 10 ans et 5 mois.
Ainsi, la pratique d’exclusivité d’importation, bien qu’étant de moindre gravité que des ententes ou abus de position dominante, a eu lieu dans un secteur stratégique soutenant des infrastructures critiques gérées par l’OPT. La dépendance des clients finaux à des solutions technologiques spécifiques, combinée à l’impossibilité pratique de substituer ces équipements sans coûts substantiels, a accentué les effets anticoncurrentiels. Ces facteurs ont conduit l’Autorité à estimer que les pratiques en cause sont d’une gravité significative.
S’agissant de l’importance du dommage à l’économie, l’Autorité a constaté que les pratiques ont significativement restreint la concurrence intra-marque des produits et services Ericsson en Nouvelle Calédonie. L’exclusivité d’importation a entrainé un renchérissement des coûts pour les clients finaux et une limitation des opportunités d’affaires pour les distributeurs alternatifs. Le dommage à l’économie, bien que significatif, demeure néanmoins modéré, notamment en raison de la persistance d’une concurrence inter-marque sur certains segments de marché.
Dans le cadre de l’individualisation des sanctions, l’Autorité a pris en compte des circonstances aggravantes, notamment la poursuite des pratiques après l’installation de l’Autorité en 2018 et le fait qu’Ericsson appartient à un groupe de dimension internationale. À l’inverse, elle a retenu plusieurs circonstances atténuantes, telles que la possibilité qu’Ericsson a eue de vendre directement ses équipements à l’OPT, la dépendance économique significative d’Intelia vis-à-vis de son fournisseur et la pleine coopération des deux sociétés tout au long de la procédure.
Les sociétés Ericsson et Intelia ayant renoncé à contester les griefs notifiés, le plafond maximal de la sanction pécuniaire encourue a été divisé par deux pour atteindre 2,5 % du chiffre d’affaires mondial le plus élevé pendant la période des pratiques.
Les deux sociétés ont également proposé des engagements pour l’avenir. Ericsson s’est notamment engagée à supprimer certaines clauses de son contrat de distribution sélective avec Intelia, à ouvrir son réseau de distribution à de nouveaux distributeurs, et à permettre des ventes directes pour certaines prestations. Intelia, de son côté, a pris des engagements visant à assainir ses pratiques contractuelles, y compris avec d’autres fournisseurs, et à informer ses clients de la fin des clauses exclusives.
L’Autorité a jugé ces engagements crédibles, substantiels et vérifiables. Afin de tenir compte de la non contestation des griefs et des engagements, elle a accordé une réduction totale de 20 % sur les sanctions normalement encourues à chaque entreprise, conformément aux propositions de la rapporteure générale.
Compte tenu des chiffres d’affaires de chacune des sociétés et de l’ensemble des éléments du dossier, l’Autorité a infligé une sanction de 417 655 000 F. CFP à Ericsson et 62 191 300 F. CFP à Intelia.