Le 3 avril 2018, le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a saisi pour avis l’Autorité de la concurrence sur le projet de délibération portant création de « l’Agence rurale » issue de l’Etablissement de régulation des prix agricoles (ERPA) et de l’Agence pour la prévention et l’indemnisation des calamités agricoles ou naturelles (APICAN). Cette nouvelle agence aura notamment pour mission de réguler les prix et l’organisation des marchés agricoles et d’attribuer des subventions aux agriculteurs notamment en cas de calamités agricoles. Le secteur agricole calédonien représente un poids de plus en plus faible dans l’économie calédonienne (moins de 2 % du PIB). Le nombre des exploitations a reculé de près de 20 % en dix ans et la population agricole représente moins de 5 % de la population actuellement. L’évolution des volumes de production marchande est très contrastée selon les filières, le taux d’autosuffisance étant globalement en baisse, alors que l’on a assisté à une progression en valeur de la production marchande corrélée à l’augmentation des prix au détail. Marqué par un milieu naturel considéré comme difficile et soumis à des aléas climatiques et sanitaires, le secteur agricole est également confronté à l’augmentation du coût du foncier et à des charges importantes, quoique mal évaluées. Ce secteur, fortement régulé et de plus en plus subventionné, se caractérise par un enchevêtrement des compétences susceptible, par lui-même, de créer ou de renforcer des distorsions de concurrence. Alors que la politique agricole et celle de la concurrence poursuivent des objectifs souvent perçus comme antagonistes, l’Autorité de la concurrence a entendu éclairer le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie sur la manière de concilier ces deux politiques publiques en lui proposant quatre recommandations de modification du projet de délibération dans l’intérêt des producteurs agricoles et des consommateurs. La première recommandation vise à confier à l’Agence rurale la mission d’assurer, en conformité avec les intérêts des consommateurs, une juste rémunération du travail des professionnels et participer à l’élaboration et à la mise en œuvre des mesures relatives à l'amélioration des conditions de concurrence et à la protection et à l'information des consommateurs. La deuxième recommandation vise à préciser les critères de nomination des « personnes qualifiées » membres du conseil d’administration de l’Agence rurale pour qu’il s’agissant d’une personne reconnue en raison de ses compétences techniques, économiques ou juridiques dans le domaine agricole ou dans celui de la régulation économique ainsi et d’une personne représentant l’intérêt des consommateurs. L’Autorité estime qu’il pourrait aussi être pertinent ouvrir les réunions du conseil d’administration aux organisations et syndicats professionnels agricoles les plus représentatifs des filières, avec voix consultatives. La troisième recommandation vise à imposer à l’Agence rurale un impératif de transparence qui se déclinerait à travers la publication sur son site internet de : – la liste des commissions ou comités créés par le conseil d’administration et de leurs membres, – d’un rapport annuel procédant notamment à une évaluation a posteriori des quotas d’importation recommandés par l’Agence en comparant les déclarations des producteurs sur les volumes de production attendus par rapport aux volumes effectivement constatés afin de réduire le taux d’erreur l’année suivante ; – de l’ensemble des aides accordées par l’agence au titre de ses différents outils d’intervention et de leurs bénéficiaires. Enfin, la quatrième recommandation vise à recentrer au sein de l’Agence rurale l’ensemble des aides au secteur agricole financées par la Nouvelle-Calédonie et, si possible, par les provinces (par convention) pour rationaliser les dispositifs d’intervention et privilégier les aides en faveur de l’investissement plutôt que le soutien des prix sur les marchés concernés.