Dans l'avis n°2023-A-03 du 31 octobre 2023, l'ACNC répond à la demande d'avis du gouvernement concernant le projet de délibération visant à inscrire les pièces détachées ou de rechanges automobiles sur la liste de l’annexe 4 du code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie ; c'est-à-dire de les classer parmi les produits et services dont les prix sont susceptibles d’être réglementés par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Bien que l’ACNC ne soit pas tenue dans le cadre de la présente saisine, de procéder à une analyse du secteur, elle a néanmoins profité de cette opportunité pour examiner le fonctionnement des marchés en cause, étant précisé que cette analyse globale ne distingue pas les différentes catégories de véhicules.
En premier lieu, il ressort des constats de l’ACNC que le projet de modification de l’annexe 4 du code de commerce, tel que soumis au Congrès, comporte 7 chapitres douaniers et près de 30 000 tarifs douaniers différents. En conséquence, le projet de délibération dépasse largement le cadre des seules pièces automobiles et son objet n’est pas en adéquation avec la nomenclature douanière visée. De plus, les modalités d’encadrement du prix n’ont pas encore été définies précisément par le Gouvernement, ceci en raison de l’absence de consensus dans la négociation engagée avec les professionnels du secteur.
En deuxième lieu, l’ACNC a pu observer que le marché amont de l’importation et de la distribution des pièces automobiles, marqué par une segmentation entre le réseau indépendant et le réseau constructeur est concurrentiel et que les prix des pièces détachées étaient affectés par des marges variables et un empilement des coûts. Le marché aval des prestations d’entretien et de réparation des véhicules automobiles bénéficie quant à lui d’une animation concurrentielle importante et de tarifs inférieurs à ceux pratiqués en métropole. Cependant, le secteur connaît des imperfections de marché, principalement liées à des problématiques d’ordre réglementaire.
En troisième lieu, l’ACNC rappelle les conditions dans lesquelles le recours à l’article Lp. 411-2 du code de commerce est possible pour réguler les tarifs de produits et de services et constate que ces conditions ne sont pas réunies en l’espèce. En effet, d’une part les pièces détachées ou de rechanges automobiles ne constituent pas des produits de consommation courante et, d’autre part, il n’existe pas d’insuffisances de la concurrence sur les marchés concernés. Le Gouvernement ne peut donc pas, au plan juridique, justifier l’encadrement des prix des pièces détachées et de rechange automobiles.
Afin d’éclairer au mieux le gouvernement, l’ACNC a néanmoins réalisé une analyse concurrentielle plus approfondie pour déterminer si la mesure envisagée répondrait de façon justifiée et proportionnée à l’enjeu du projet de texte. S’il ne fait aucun doute que la mesure envisagée poursuit un objectif d’intérêt général ayant trait au pouvoir d’achat et à la sécurité des automobilistes calédoniens, l’ACNC constate pourtant qu’elle implique des risques disproportionnés d’atteinte à la libre concurrence. Il ressort en effet des conclusions de l’ACNC que la réglementation des prix des pièces automobiles relève d’une mécanique complexe susceptible de pénaliser l’équilibre du secteur et surtout, qu’elle risque de conduire à une hausse des coûts pour le consommateur soumis à des stratégies de rattrapage et de report de la part des professionnels. En revanche, il existe des solutions moins attentatoires à la concurrence, permettant de garantir une baisse des prix et la sécurité des usagers de la route.
Pour l’ensemble de ces raisons, l’ACNC recommande de laisser le jeu de la concurrence s’opérer librement quant au prix des pièces détachées et de rechange automobiles (recommandation n° 1) et d’ouvrir un chantier réglementaire élargi pour résoudre les imperfections de marché relevées, au bénéfice des automobilistes calédoniens et de leur sécurité (recommandation n° 2).